Accorder son violoncelle

 

Ah !  Avant de jouer, Il faut s’accorder !! Et voilà souvent  la panique qui pointe son nez  si on est observé pendant cette délicate entreprise ….

Nous avons souvent l’impression d’être en train de faire l’inverse de ce que celui qui nous écoute ferait, à en perdre notre capacité à nous recentrer sur le son. Et nous nous  retrouvons facilement dans une situation de projection avec l’idée bien accrochée que ceux qui nous écoutent nous jugent, et nous jugent de façon négative, parce que, eux, ils savent entendre…

Pas de chance avec un violoncelle : la manœuvre se voit bien et nous ne pouvons pas, comme les violonistes,  simplement tourner la cheville de notre corde dans un sens et un autre jusqu’à entendre que « nous y sommes » : chez nous, on y va cran par cran : on monte on écoute, on descend, on écoute… Et notre critique sans donne à cœur joie : « tu n’entends rien, tu ne sais pas, tu es nul » etc..

Alors, il faudrait calmer tout cela… En premier lieu, lorsque nous nous accordons, nous sommes en exploration et donc nous cherchons quelle est la justesse la plus pertinente et pour se faire, nous avons besoin d’entendre un certain nombre de solutions avant de nous décider : donc montons ou descendons notre note sans scrupules !

En deuxième lieu nous ne devons pas oublier que nous jouons sur un instrument non tempéré. Ce qui veut dire que notre justesse dépend du contexte et s’adapte à la tonalité, à l’accord  et aux notes alentours. Ce qui veut dire aussi que la justesse n’est pas celle de l’outil-accordeur. Elle est bien plus fine. Plus vulnérable peut être aussi : Une finesse entraîne souvent une fragilité…

Elle est relativement personnelle aussi : dans un orchestre, lorsqu’il y a une mélodie à faire à l’unisson, on remarque souvent que chacun n’en a pas la même écoute : pour améliorer la chose, il faut faire cette phrase ensemble et la refaire jusqu’à ce que, par consensus, on trouve la justesse qui convient à tout le monde et non à chacun. C’est troublant.. et rassurant !

Il me semble que nous arriverons mieux à trouver « notre » justesse et à l’assumer si nous élargissons le débat à autre chose que la seule hauteur de la note. C’est une notion difficile à concevoir alors autant s’aider avec d’autres éléments…

La personne sur qui je m’accorde joue son LA, je joue le mien. Le timbre n’est pas forcément le même mais la hauteur doit l’être : c’est déjà compliqué à entendre ! Il faut que les deux personnes essaient de trouver un timbre le plus commun possible, cela facilitera les choses. Je tente donc de m’adapter au plus près de ce que j’ai entendu : même attaque, même force, même longueur…. Cela enlève des paramètres qui troubleraient mon écoute. J’essaie, en entendant le LA de référence, de lui donner une couleur bien nette : jaune ? Oui mais jaune comment ? Paille, œuf, canari ?? Il faut préciser. En entendant alors le mien, il sera peut-être plus facile de distinguer la différence (ou la ressemblance si les deux LA sont les mêmes.)  Si j’entends le mien plus sombre ou plus clair, ou plus pâle ou plus franc.. la décision de monter ou descendre sera peut-être plus facile parce que, dans un premier temps, je ne focalise plus seulement sur la hauteur.

Si les couleurs ne sont pas parlantes, on peut essayer avec une forme (plus étroit, plus large, plus gros..) une matière (plus tendre, plus velouté, plus résistant) une image (une fenêtre grande ouverte ou presque fermée, un personnage bien dans sa peau ou malingre…) ou toutes sortes d’imaginaires (il suffit de trouver le sien) qui vont m’aider à ne pas prendre mon problème trop frontalement et ouvrir mon monde à un maximum de paramètres. En me donnant le droit ensuite de tâtonner, je trouverai sans doute assez rapidement dans quel sens associer ces images à la hauteur.

Voici mon LA accordé. Vient maintenant le problème de la quinte (Ré-LA). Je peux me servir dans un premier temps d’un accordeur de façon à entendre ce qu’est une quinte pour cet appareil. Je peux l’associer là aussi à l’une des notions précédentes : fait-elle référence pour moi à un espace large,  étroit, solide, mou ? Je vais ensuite en faire ma propre adaptation (l’accordeur est tempéré, pas nous !!). Entendre comment, moi, je veux entendre cette première quinte (la différence avec l’accordeur sera bien sûr infime, mais elle a le droit d’exister !) lui donner un équilibre, une netteté, une taille, comme une pièce d’une maison que je veux harmonieuse : elle a en commun avec cette idée de pièce d’une maison qu’elle a un volume… La quinte suivante doit avoir la même harmonie (au sens esthétique du terme) et la troisième aussi. L’ensemble doit avoir une cohérence, des affinités… je vais bien sûr à nouveau m’aider de mon imaginaire. Les pièces de ma maison doivent avoir des points communs, une signature.

 

 

 

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