Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°18 : aller de l’avant avec le corps.

Lorsque nous jouons de notre instrument, notre archet fait d’une certaine façon du sur-place puisqu’il a une longueur donnée et qu’il ne peut que tirer ou pousser entre talon et pointe.

Nous avons pourtant besoin de sentir que la phrase a une trajectoire bien plus longue que les 70 centimètres qui nous sont concédés !

Pour vivre la phrase dans tout son développement, notre corps dans son entier, sans le percevoir réduit aux mouvements de nos deux bras, est un partenaire indispensable qui peut contrecarrer cette éventuelle sensation de réduction de l’espace. Nous pouvons agir intérieurement pour que la courbe de la phrase, sa direction, son intensité, sa dynamique soient vécues de l’intérieur dans des dimensions très vastes. Et nous devons également laisser notre corps s’engager pour soutenir notre objectif. Le buste, dans des mouvements condensés, sera bien sûr très présent. Il entraînera le bassin, les jambes, les pieds… Tout ceci nous donnera un axe très important pour soutenir notre phrasé … dans les 3 dimensions et sans retenue.

Je trouve qu’une belle illustration de ce phénomène de vécus d’élans musicaux dans le corps se retrouve dans les peintures de Fabienne Verdier que je vous conseille vivement de consulter. On y trouve une vitalité dans l’espace qui s’allie au temps et n’est ce pas ce que nous devons chercher à faire avec la musique ?

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°17 : Battre la mesure.

Lorsque nous rentrons dans une nouvelle partition il est important, bien sûr, d’avoir une connaissance du texte bien avancée avant de commencer à déchiffrer avec son instrument.

Nous avons pour se faire un bon outil sous la main, c’est évidemment notre voix.
Chanter, chanter et chanter encore .. Ne laisser aucune zone d’ombre, aucun angle mort, de façon à ce que notre archet n’induise pas de mauvais rythmes (il adore ça, il faut bien l’avouer !) ni notre main gauche de mauvaises hauteurs de notes.

Il est donc très important de solfier mais de le faire, non pas avec une simple pulsation, mais en battant la mesure. Nous devons, dès la première lecture, avoir conscience de la structure de nos phrases. Les temps forts ne sont pas les mêmes à 2, 3 ou 4 temps, et notre mémoire sera plus efficace si nous les introduisons dès le départ ainsi que les élans et les balancements du texte. Ainsi, au lieu d’avoir une succession de temps tous identiques, la musique prendra déjà vie et le sens en sera plus compréhensible. Les notes et leurs rythmes seront animés, la marche, la danse, feront intrinsèquement partie de ce que nous essayons d’assimiler au lieu de juste émettre un texte froid et monotone.

Bref nous serons déjà en train de « jouer », au premier sens du terme.

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°16 : Les déplacements fluides.

Lorsque nous nous posons la question de la justesse d’un déplacement de main gauche, nous pouvons vite conclure qu’il est tout à fait improbable d’arriver exactement où l’on veut avec la justesse que l’on souhaite puisque notre doigt doit arriver sur une surface tout à fait minuscule.
Et pourtant, nous réussissons à obtenir cette exactitude.

Le meilleur moyen pour que ce gestes soit aisé est de travailler la glissade en s’assurant qu’elle est absolument complète, de la note de départ jusqu’à la note d’arrivée, sans la moindre coupure.
La plus petite saccade dans le son vient d’une non fluidité de l’ensemble du geste. En étant attentif à cette continuité du son, nous pourrons mieux repérer à quels moments ont lieu les éventuelles tensions dans notre mouvement. Est-ce au début du déplacement ? En son milieu ? Vers l’arrivée ?
Notre oreille, elle aussi, sera rassurée par un ensemble d’informations complètes. Elle saura alors mieux contrôler le moment de l’arrêt du bras et de la main car elle pourra l’anticiper plus finement.

En travaillant d’abord très lentement cette glissade sans aucun heurt on remarquera sans doute le confort de la main gauche qui ne se crispe plus car elle sait où elle va. Elle peut d’autre part plus facilement garder sa forme, ce qui est indispensable pour son confort et sa précision. Souvent l’à-coup a lieu au début ou à la fin du déplacement et on sera donc particulièrement attentif à ces deux moments.

On peut se préparer à cet exercice en chantant le déplacement au lieu de le jouer pour s’habituer à cette complétude de la glissade :Ce n’est pas si évident de chanter en n’omettant aucune partie de la glissade ! On sera alors vigilant quant à la différence de sensations dans notre gorge aussi.
Puis on travaillera sur notre instrument, tout d’abord avec le même doigt au départ et à l’arrivée du déplacement. Puis avec un doigt différent au départ et à l’arrivée. Notre oreille, alors, sera notre principale guide pour éviter les à-coups.

C’est presque un exercice méditatif au départ mais il est le garant de la précision de nos changements de position.

Après avoir perçu nettement cette glissade lentement, il faudra bien sûr la réaliser dans la vitesse sans perdre la qualité de son intégrité.

Attention ! Avoir un geste fluide et complet ne veut pas dire qu’il ne sera pas tonique. Nous avons besoin des 2 ingrédients : geste complet et dynamisme : ce sont deux qualités qui doivent s’associer. Donc, nous éviterons de faire un amalgame entre continuité de la glissade et régularité de celle-ci : notre geste de déplacement n’est pas un geste régulier : il demande une arrivée articulée donc plus rapide…

Et enfin, l’archet, comme nous le savons, doit être un élément facilitant pour arriver à nos fins.

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°15 : Comment regarder la partition ?

Pour réussir le mieux possible à jouer ce que nous voulons, nous avons souvent tendance à regarder les notes avec un rayon laser à la place des yeux : de façon très directe et très focalisée sur l’endroit très précis que nous voulons jouer, en regardant seulement 4 ou 5 notes. Ceci nous empêche d’avoir une sensation globale de ce que nous allons faire et d’anticiper la suite. Nous nous trouvons très vite en situation de stress, voire de panique….

De la même façon, il est amusant de constater que, systématiquement, lorsque nous nous trompons dans le texte, nous avons le réflexe de nous rapprocher brusquement de la partition pour regarder de plus près alors que, bien sûr, notre vue n’est en aucun cas responsable de l’erreur.

Essayez de faire cette expérience : regardez d’abord votre partition de la façon décrite à l’instant (c’est à dire, comme d’habitude!)… Observez les tensions que cela implique dans vos cervicales, dans vos yeux, dans votre respiration, dans vos épaules…

Maintenant, obligez-vous à regarder votre texte de façon beaucoup plus inclusive, comme si vous vouliez englober au moins la moitié de votre page dans votre espace visuel. De façon presque flottante. Faites-le tout d’abord sans votre instrument puis en jouant.

Observer comme votre attitude corporelle se transforme : vous êtes plus détendu, certainement. Vos yeux, vont cesser de sortir de leurs orbites, votre nuque et beaucoup d’autres muscles, en amont de la chaîne musculaire, vont se trouver moins sollicités. Et les conséquences seront nombreuses sur votre état d’esprit. Tout à coup, votre mental va lui aussi commencer à comprendre que votre vie n’est pas en danger ! Vous serez mieux capable d’anticiper et de prendre du recul pour gérer ce que vous devez faire. Vous écouterez mieux, sans doute, aussi.

En prenant ce recul, dans tous les sens du terme, vous allez certainement trouver plus de sérénité dans votre jeu.

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Les petits articles pédagogiques – N°14 : Méthode de travail.

Nous avons souvent parlé de la méthode de travail mais peut-être pouvons-nous rajouter ceci :

Il est plus efficace de travailler en commençant par la dernière mesure de ce que nous voulons améliorer dans notre partition puis en rajoutant, en amont, une mesure, puis une autre mesure, etc. et en allant, à chaque fois, systématiquement jusqu’au bout du passage en cours.

Ainsi, nous étudions à chaque fois une nouvelle mesure mais nous savons déjà ce qui va se passer dans toutes les mesures suivantes et cela est très sécurisant. Les tensions, aussi bien psychiques que physiques, seront moins grandes et la satisfaction de rentrer petit à petit dans le monde du connu est non négligeable.
De plus, nous faciliterons ainsi notre capacité à anticiper et nous savons combien cela est important pour maîtriser notre jeu.

Nous pourrons alors plus facilement utiliser notre petite phrase : « ah oui, maintenant je sais qu’il va se passer ceci ou cela. » Notre corps répondra mieux et de façon plus détendu et c’est bien ce que nous cherchons !

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Les petits articles pédagogiques -N°13 : Appuyer ou résister. La suite.

Intéressons-nous plus en détail à l’ensemble du bras droit :

Je veux faire un petit détaché legato rapide…. Que font mes doigts ? Que fait mon poignet ? Que font mes autres articulations ? Nous pouvons évoquer la question de la « tenségrité », cette notion employée surtout en architecture pour étudier le jeu des forces, les tensions et les compressions qui doivent s’équilibrer dans une structure pour que l’ensemble fonctionne.

Le but pour moi, pour réussir ce détaché, est que la corde puisse rentrer et rester en vibration malgré le mouvement tirer-pousser qui la gêne. Je dois donc créer à nouveau des résistances avec mon bras pour qu’elle puisse réagir et qu’à chaque mouvement d’archet l’émission soit précise (un petit « k » à chaque tourne d’archet, sans que j’aie besoin de rajouter un mouvement pour autant).

Si je suis trop souple, je n’aurai aucun résultat concluant. Ma corde ne pourra pas faire entendre les harmoniques graves , mon son va siffler et sera mal défini.
Pourtant, parce que nous voyons des instrumentistes avoir un certain nombre de mouvements de doigts et de main, nous avons tendance à voir la souplesse comme le saint Graal. Cette notion de souplesse est omniprésente dans notre travail, à juste titre, mais, ne serions-nous pas souvent en train de confondre « souplesse » et « mollesse » ?

A l’opposé, si je suis trop tendue, le résultat ne sera pas plus satisfaisant.

Je ne dois jamais perdre de vue que la corde est en tension (tension différente selon que je sois près ou loin du chevalet) et je dois donc adapter celle de l’archet, via mon bras droit (le bras allant de l’omoplate jusqu’aux bouts des doigts), pour que l’équilibre de l’ensemble fonctionne. Si ma corde est une résistance, je dois lui opposer de la résistance.

Où se situent les articulations qui doivent garder de la souplesse et où se situent celles qui doivent être en résistance ?

Mes doigts et la voûte de ma main, nous l’avons vu, n’ont aucun intérêt à être trop souples sous peine de n’avoir aucune action efficace dans le contact avec l’archet puis la corde. Ils transmettent le poids qui vient du bras et doivent résister pour que celui-ci ne soit pas perdu.
Mon poignet, de la même façon, n’a pas à faire de grands gestes ni dans l’horizontale, ni dans la verticale, sous peine de provoquer dans l’archet des mouvements beaucoup trop aléatoires et de se transformer en absorbeur de poids alors qu’il doit lui aussi être en capacité de le laisser passer. Il est plutôt dans l’idée de résister, juste ce qu’il faut, pour rester dans sa forme.

Si je fais un petit détaché, mon coude, et donc l’ensemble de mon bras, dans son déplacement horizontal, ne sera que juste un peu sollicité (quelques centimètres, pas plus que la longueur d’archet que j’utilise).
La tête de mon humérus, entre la clavicule et l’omoplate, doit être libre (mais toujours avec une mobilité petite, pour la même raison) et mon omoplate doit tenir cet ensemble pour que le contrôle du geste total soit juste. Puisque mes omoplates sont en situation de résistance, le bas de mon dos le sera aussi. Ce qui ne veut absolument pas dire qu’on est dans une situation de tension : Résistance et tension ne sont pas du tout cousines !

les micro-mouvements (que l’on pourrait dire synonyme d’un corps vivant.. ) sont bien présents partout et mon attention va aussi se fixer comme objectif de ne surtout pas les éliminer.

En fait, l’ensemble de mon buste a le même rôle que celui d’une personne qui assure un grimpeur en escalade : Fiable, solide, ouvert et tonique (donc non figé).

On peut aussi rapprocher cet équilibre général de celui d’un pont ou d’une construction en zone sismique : solide et sûr, mais pour cela, non figé…

Alors finalement, presque rien ne bouge ?? Et oui.. et pourtant rien n’est immobile non plus.

un corps, quoi ! jamais pétrifié.. Tout est dans la capacité de trouver le juste état des articulations et la sérénité qui s’en suit.

On peut trouver la sensation de cette résistance en faisant ceci : secouez votre bras dans tous les sens avec un poignet que vous ne tenez pas du tout : au niveau de la main, les mouvements sont très désordonnés, forcément. Maintenant secouez votre bras mais cherchez la petite résistance que doit avoir le poignet pour simplement rester dans le prolongement de l’avant-bras : c’est cette tenue-là du poignet que nous utiliserons pour jouer en étant confortable. De même , si vous secouez votre bras, vous pouvez constater que votre buste tient pour ne pas être lui aussi trop agité.

Et c’est aussi par ce contrôle de la tenségrité que je peux, paradoxalement, trouver ma souplesse, c’est à dire le mouvement juste et nécessaire.

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Les petits articles pédagogiques -N°12 : Assurer sa justesse.

Un petit exercice très simple à nouveau :

Le but sera de faire un mi en 1e position avec le 1e doigt sur la corde de Ré.
Je place mon bras gauche le long du corps puis je décide de jouer ce mi. Que se passe-t-il dans le déroulement de mes actions ? Ai-je bien chanté le mi dans ma tête (ou à haute voix, au besoin) avant que ma main ne commence à se diriger vers le mi ? Ai-je pris le temps de me représenter la place de mon doigt sur la corde (sans regarder la corde) avant que ma main ne commence à faire le moindre mouvement? Suis-je capable de ressentir l’ensemble du mouvement que le bras doit effectuer pour conduire le doigt à sa place avant de le faire réellement? Si la réponse est non alors il faut remettre de l’ordre dans tout cela ! Le corps est extrêmement efficace s’il connaît la finalité d’une manœuvre mais s’il l’ignore il devient peu fiable et tendu. Lui donner pour seule consigne « je veux jouer un mi » n’est pas très explicite parce que pas assez concret.
Pour résumer, nous avons besoin de plusieurs éléments pour assurer notre justesse : l’écoute interne de la hauteur de la note que nous désirons jouer, sa place géographique précise, et également la sensation anticipée du geste à faire pour aller à la bonne place. Tout ceci, dans un premier temps, avant que le moindre mouvement n’ait encore eu lieu.

Bien sûr, vous utiliserez ensuite cette façon de faire pour tout déplacement sur le manche et vous le ferez en prenant le temps de vous arrêter avant chaque geste afin de prendre l’habitude de bien conscientiser cette manœuvre.

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°11 : appuyer ou résister ?

Trouver l’équilibre entre « appuyer » nos doigts et « laisser passer le poids » dans nos doigts est un soucis constant qui peut poser bien des problèmes. Notre fluidité de jeu, notre qualité de son et notre bien-être physique et psychique gagneront évidemment à savoir utiliser la deuxième solution.

Posons-nous la question de la façon dont nos doigts de la main gauche agissent entre le poids que leur apporte le bras et la corde :

Bien sûr ils sont sans cesse en mouvement. Ils doivent savoir quitter ou rentrer dans la corde avec rapidité. Ils doivent en même temps savoir être indépendants les uns des autres ou au contraire s’unir pour tomber en même temps sur la corde. Ils doivent pouvoir être enfoncés suffisamment dans la corde pour que le son soit clair. Ils doivent aussi savoir glisser sur la corde pour les déplacements. Tout ceci en évitant de crisper le bras, la main ou les doigts. Le poids est amené dans la main par l’intermédiaire du bras qui, lui, est aidé par l’omoplate, le buste, voire l’ensemble du corps via de micro-mouvements. Ceci peut se faire relativement facilement sans efforts disproportionnés.

Mais quid de l’articulation de la base de nos doigts ? Celle qui se trouve être la zone en mouvement et qui ne doit pas pour autant engloutir l’apport du poids qui arrive en amont ? Comment garder la plus grande partie de cet approvisionnement en poids dans ces quatre petites choses que sont nos doigts sans les rendre gourds et tendus ?

Voici une petit expérience pour résoudre ce problème :

Posez vos doigts de la main gauche sur votre bras droit, comme si celui-ci était votre touche. Enfoncez-les tout d’abord : conscientisez l’effort et constatez la sensation de tension de vos doigts : elle est très forte. Beaucoup de muscles rentrent en travail y compris dans votre main. Le pouce se tend lui aussi.

Maintenant sentez que l’articulation de la base de vos doigts (et également des autres articulations des doigts, bien sûr) peut simplement être en situation de résistance entre le poids amené par le bras et la main, et la corde de l’autre côté. Faites à nouveau le constat de l’état de vos doigts : vous allez peut-être réaliser qu’ils sont beaucoup moins tendus, et que les muscles de la main ne font pas du tout le même effort. Quant au pouce il ne se sent plus tellement concerné par ce geste.

Ce serait donc la solution à chercher !

Essayer de bien sentir le déroulement de cette résistance soit en partant du bras vers la corde soit en partant de la corde vers le bras.

Vous verrez aussi que lorsque vos doigts quitteront la corde, ils auront sans doute bien moins de peine à se détendre avec rapidité ainsi que la paume de votre main. Peut-être même auront-ils moins de mal à garder leur forme arrondie : le jeu sera plus pneumatique et vos doigts et votre main vous remercieront !

Le cadeau est bien sûr que le processus est identique du côté droit avec l’archet : Inutile de serrer les doigts et la main : ils doivent juste résister, faire un pont de poids entre votre bras et la baguette.

Et votre main trouvera certainement plus vite la solution si vous avez bien étudié le problème à gauche.

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N°10 : Votre rythme est -il audible ?

Pour cette semaine, qui correspond plus ou moins à la rentrée, reprenons un peu les basiques.
Se pencher un peu sur le rythme ne fera peut-être pas de mal…

Ce qu’on appelle le rythme c’est, d’une part, la dynamique et d’autre part, savoir faire dans un temps donné (dans une pulsation, donc) des divisions égales ou inégales. C’est également, en pensant plus large, donner la notion de la mesure, avec ses temps forts et ses temps faibles. La combinaison de tous ces paramètres provoque des appuis et des relâchements indispensables pour que la musique reste vivante et tonique.

L’exercice est simple : Nous allons faire des croches sur cordes à vide (puis des notes diverses en variant de plus en plus souvent une fois que tout va bien, de façon à rajouter un élément qui peut créer une difficulté).

Nous avons le choix entre faire des croches dans une mesure binaire (2 croches par temps) ou des croches dans une mesure ternaire (3 croches par temps). Commençons par travailler cette différence de façon à la rendre audible.

Puis, nous allons rajouter un élément en décidant que nous sommes dans une mesure à 2/4. Le temps fort sera sur la 1e croche du 1e temps. Nous allons donc la propulser un peu plus que les autres (et non pas l’appuyer ni la ralentir, ni l’accélérer …). Les autres croches de la mesure se jouent avec seulement l’intention d’aller jusqu’au retour du 1e temps de la mesure suivante. Mais il faut pourtant créer une petite impulsion aussi sur le 2e temps comme nous l’avons fait dans l’exercice précédent pour faire comprendre que nous jouons des croches en binaire …
Maintenant , essayons la mesure à ¾ : le temps fort est sur la 1e croche du 1e temps, le 3e temps ramène avec un élan la mesure suivante. Malgré tout nous devons bien garder dans notre archet la notion des groupements (réguliers! ) par 2 croches.
La mesure à 4/4 à présent : la 1e croche du 1e et du 3e temps est forte mais le 3e temps est un peu moins important que le 1e temps. Le but est toujours d’atteindre la mesure suivante, de façon à différencier le 4/4 du 2/4…

Faisons maintenant la même chose avec les mesures ternaires :
Le 6/8 avec ses 2 temps composés de 3 notes de valeur égales (que nous avons expérimenté dans le premier exercice). A nouveau, la 1ere croche du 1e temps est pneumatique et le reste suit mais nous groupons toujours les notes par 3 (sans alourdir, toujours, et sans dérégler la régularité !)

Le 9/8 dans lequel l’impulsion est sur la 1ere croche du 1e temps et où les 3 croches du 3e temps ramène la mesure suivante.
Le 12/8 avec ses 2 temps forts sur les 1e et 3e temps….

Les mesures ternaires sont plus dansantes que les mesures binaires qui sont plus carrées. Nos gestes seront différents.

Maintenant le jeu consiste à faire deviner à un auditeur quelle est la mesure que vous êtes en train de faire. Avec quelques difficultés bien sûr entre par exemple le ¾ et le 6/8… La différence sera peut-être essentiellement audible par l’intention que vous donnez ?

N’oubliez surtout pas qu’il n’est pas nécessaire de faire les choses exagérément pour se faire comprendre, bien au contraire…

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Les petits articles pédagogiques de Méandres Musicaux- N° 9 : le GPS.

Posons -nous la question de savoir si, lorsque nous jouons un morceau, nous sommes certains que les consignes que nous devons nous donner à nous-mêmes en permanence sont parfaitement claires et réellement aidantes.
Nous avons besoin, en continu, d’un bon GPS qui va nous donner les consignes de notre jeu tout au long de notre voyage et les moyens de les réaliser : « Dans la mesure suivante, c’est là que le doigté change et je dois mettre un ré 1e doigt au lieu d’une ré 4e doigt »… « Attention le bariolage est dans 2 mesures et je dois prendre la bonne place d’archet »… « là, ne pas oublier de détendre le bras gauche pour préparer le démanché » … «  C’est l’endroit où le coup d’archet sur le temps fort se fait une fois en tirant une fois en poussant  »… « ah oui ! c’est là qu’il faut aller à la pointe »… « ah oui ! Attention au doigté ici, je l’ai bien en tête »… « Ah oui ! C’est là qu’il y a ce fameux fa# »…

Tout notre parcours doit être clairement énoncé, en temps réel (mais anticipé ) et à chaque fois que l’on joue.
Plus la formulation est claire, plus nous serons apaisé dans notre jeu.
Mais nous n’avons pas non plus le temps de nous perdre dans les détails pendant l’exécution de notre morceau puisque la musique avance inexorablement !
Il faut donc procéder en deux étapes : d’abord travailler consciencieusement chaque élément, technique ou musical, en énumérant, à haute voix et précisément, les gestes que l’on veut faire, sans rien omettre :  « maintenant je vais faire …..». Puis, trouver une phrase raccourcie (ou un système de pensée personnel ) qui ne dira plus que les éléments essentiels pour réaliser le geste, mais qui contiendra tous les autres.

Autrement dit, pour un démanché par exemple, le premier travail peut consister à dire : « je vais aller en 3e position sur la corde de Ré, avec un 1e doigt je fais donc une substitution entre mon 4e et mon 1e doigt / j’ai bien la hauteur du Ré en tête / attention à l’archet qui doit aider au lieu de s’arrêter / mon bras gauche doit sentir le geste avant/ attention au son/  je sais que le Ré est là / respire !» etc. Puis tout ceci pourra se résumer en un : « substitution 4/1 » si ce contenant implique toutes les autres formulations précédemment énoncées.

La difficulté peut être de ne pas se tromper sur les éléments à conserver dans notre raccourci final. Souvent plusieurs expérimentations peuvent être nécessaires pour trouver ce qui sera le plus pertinent pour notre tête, notre corps et notre mémoire. On voit, pour reprendre l’exemple du GPS ,que celui-ci ne nous donne pas toujours les bons indices pour comprendre où il faut aller !! Tâchons d’être plus efficace que lui !

D’autre part il est primordial de penser notre phrase au moment ad hoc. Et, à nouveau, le GPS peut nous aider à comprendre : si l’énoncé est entendu trop tard, on rate la route ou, pire, on a un accident.. De même, si je pense trop tard mon corps n’a pas le temps de se préparer et je me mets en tension.
Il faudra donc aussi inclure dans notre travail cette recherche du « bon moment ».

Tout ce travail de détail ne doit pas non plus nous faire oublier la vue d’ensemble, la suite et la fin de la phrase, le passage à la phrase suivante, le plan général de l’œuvre. Nous devons en même temps avoir une vision panoramique du déroulement de notre morceau et pouvoir en formuler tous les détails.

Dans la conduite automobile il est toujours conseillé de voir venir la route vers nous plutôt que d’aller vers elle. Au niveau de notre conduite musicale, cela sera obtenu par une bonne connaissance de ce qui nous attend de façon à aborder les choses, à chaque fois, avec anticipation et sérénité.

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