Posons -nous la question de savoir si, lorsque nous jouons un morceau, nous sommes certains que les consignes que nous devons nous donner à nous-mêmes en permanence sont parfaitement claires et réellement aidantes.
Nous avons besoin, en continu, d’un bon GPS qui va nous donner les consignes de notre jeu tout au long de notre voyage et les moyens de les réaliser : « Dans la mesure suivante, c’est là que le doigté change et je dois mettre un ré 1e doigt au lieu d’une ré 4e doigt »… « Attention le bariolage est dans 2 mesures et je dois prendre la bonne place d’archet »… « là, ne pas oublier de détendre le bras gauche pour préparer le démanché » … « C’est l’endroit où le coup d’archet sur le temps fort se fait une fois en tirant une fois en poussant »… « ah oui ! c’est là qu’il faut aller à la pointe »… « ah oui ! Attention au doigté ici, je l’ai bien en tête »… « Ah oui ! C’est là qu’il y a ce fameux fa# »…
Tout notre parcours doit être clairement énoncé, en temps réel (mais anticipé ) et à chaque fois que l’on joue.
Plus la formulation est claire, plus nous serons apaisé dans notre jeu.
Mais nous n’avons pas non plus le temps de nous perdre dans les détails pendant l’exécution de notre morceau puisque la musique avance inexorablement !
Il faut donc procéder en deux étapes : d’abord travailler consciencieusement chaque élément, technique ou musical, en énumérant, à haute voix et précisément, les gestes que l’on veut faire, sans rien omettre : « maintenant je vais faire …..». Puis, trouver une phrase raccourcie (ou un système de pensée personnel ) qui ne dira plus que les éléments essentiels pour réaliser le geste, mais qui contiendra tous les autres.
Autrement dit, pour un démanché par exemple, le premier travail peut consister à dire : « je vais aller en 3e position sur la corde de Ré, avec un 1e doigt je fais donc une substitution entre mon 4e et mon 1e doigt / j’ai bien la hauteur du Ré en tête / attention à l’archet qui doit aider au lieu de s’arrêter / mon bras gauche doit sentir le geste avant/ attention au son/ je sais que le Ré est là / respire !» etc. Puis tout ceci pourra se résumer en un : « substitution 4/1 » si ce contenant implique toutes les autres formulations précédemment énoncées.
La difficulté peut être de ne pas se tromper sur les éléments à conserver dans notre raccourci final. Souvent plusieurs expérimentations peuvent être nécessaires pour trouver ce qui sera le plus pertinent pour notre tête, notre corps et notre mémoire. On voit, pour reprendre l’exemple du GPS ,que celui-ci ne nous donne pas toujours les bons indices pour comprendre où il faut aller !! Tâchons d’être plus efficace que lui !
D’autre part il est primordial de penser notre phrase au moment ad hoc. Et, à nouveau, le GPS peut nous aider à comprendre : si l’énoncé est entendu trop tard, on rate la route ou, pire, on a un accident.. De même, si je pense trop tard mon corps n’a pas le temps de se préparer et je me mets en tension.
Il faudra donc aussi inclure dans notre travail cette recherche du « bon moment ».
Tout ce travail de détail ne doit pas non plus nous faire oublier la vue d’ensemble, la suite et la fin de la phrase, le passage à la phrase suivante, le plan général de l’œuvre. Nous devons en même temps avoir une vision panoramique du déroulement de notre morceau et pouvoir en formuler tous les détails.
Dans la conduite automobile il est toujours conseillé de voir venir la route vers nous plutôt que d’aller vers elle. Au niveau de notre conduite musicale, cela sera obtenu par une bonne connaissance de ce qui nous attend de façon à aborder les choses, à chaque fois, avec anticipation et sérénité.