Ateliers d’improvisation avec les élèves

Orchestre des tout petits élèves cordes au CRR

En 2007-2008 et 2008-2009, le Conservatoire Régional de Lyon a créé des orchestres pour les tous jeunes instrumentistes à cordes : des élèves qui étaient en première ou deuxième année d’apprentissage. Le défi était assez redoutable car il est toujours difficile que des enfants si jeunes, et un peu accaparés tout de même par le côté technique de leur instrument, puissent vraiment s’écouter et jouer ensemble… Nous avons trouvé une solution appropriée en faisant deux moments différents de travail : un premier temps avec un véritable travail sur partitions et un deuxième temps d’improvisation en groupe. Les enfants se retrouvant successivement dans les deux projets. Une de mes collègues s’occupait de l’orchestre proprement-dit et je gérais de mon côté le groupe d’improvisation cordes. Cette formule ayant le mérite d’apprendre aux élèves des façons différentes de se concentrer et de jouer.

L’expérience d’un grand groupe d’une vingtaine d’enfants en même temps ( !) -avec un mélange de violons, altos, violoncelles et contrebasses- étant nouvelle pour moi, il a fallu innover car le genre d’exercices et de consignes d’improvisation que je propose en général, s’adressant plutôt à un groupe d’un maximum de six personnes, étaient ici inadaptés…

Le travail a consisté d’abord à prendre conscience du fait que l’on n’était pas tout seul et qu’il fallait donc tenir compte de cela, puis à écouter ce qui se passait autour de soi, à faire du travail de pulsation très simple : marcher, s’imiter, d’abord sans instrument, puis avec… Savoir se faire comprendre si on est celui qui donne le rythme, le caractère… travailler son imagination et la mettre en sons sur son instrument… puis en groupe, s’organiser… toujours passer par le ressenti du corps avant de rajouter l’instrument avec n’importe quelle consigne de jeu…

La fin du travail s’est concrétisée par un concert moitié orchestre moitié improvisation. Des jeux, beaucoup de connivence, de la musique et le résultat de notre travail d’imagination…

Concert ensemble impro des petits 2009 : improvisation* avec des petits élèves de l’orchestre à cordes. La consigne : se lever chacun son tour en gardant une pulsation stable, puis faire chacun un son sur son instrument toujours avec cette pulsation. Dans la 2e partie : un élève donne des consignes à différents groupes de l’orchestre grâce à des signes prédéfinis. Son choix est bien sûr totalement improvisé, juste en lien avec ce qu’il écoute et l’envie qu’il a de continuer d’une façon ou d’une autre. Les élèves gardent également une certaine liberté dans chaque consigne. Celle-ci peut vouloir dire : « glissades », « mouvement très rapide », « garder une note tenue », « faire une note avec un accent »….etc.

 

Ensembles cordes premier cycle

Depuis 2010, des ensembles divers ont été créés au Conservatoire de façon à ce que les élèves puissent, d’années en années, faire des expériences de formes musicales différentes.

J’ai pris en charge deux ateliers d’improvisation : l’un de petits instrumentistes à cordes du premier cycle (entre 3 et 4 ans d’instrument) et l’autre d’élèves du deuxième cycle (6 ou 7 ans d’instrument). Je les vois une fois tous les 15 jours pour les initier à l’improvisation dans un groupe qui ne dépasse pas 6 instrumentistes et qui peut regrouper des violons, des altos, des violoncelles, des contrebasses et également des violes. Cette rencontre, fréquente puisque bimensuelle, permet un vaste champ d’expériences , le travail en lien avec le corps y prend une grande place et l’on peut aussi consacrer un certain temps au problème du lien à l’espace scénique et l’attitude, particulière et peu souvent abordée au cours des études instrumentales, que cela nous oblige à développer, nous, musiciens. Une sensation de grande liberté règne dans cette heure de travail puisque nous n’y avons aucune contrainte, ni d’examen, ni de travail à fournir d’une séance à l’autre : pour un enseignant (et pour les enfants) c’est aussi un lieu de respiration important.

Depuis l’année 2017-2018, cet atelier s’ouvre à tous les instruments : l’oreille et la curiosité vont être encore plus sollicitées!!

« En fait, l’improvisation, c’est à la fois du théâtre, de la poésie et de la musique »… commente une jeune élève après le deuxième atelier de l’année…

 

Ateliers d’improvisation pour les violoncellistes en fins de cycles

L’équipe des enseignants de violoncelle du Conservatoire de Lyon a décidé depuis l’année 2003 que les élèves des fins de cycles un et deux (4 ans de violoncelle et 8 ans de violoncelle) participeraient à des ateliers d’improvisation sur toute l’année de cette fin de cycle.

Mes collègues m’ont confié ce travail que je fais avec beaucoup de plaisir. Les ateliers se font par groupes de 4 à 6 violoncellistes à peu près une fois par mois. Mes collègues constatent une évolution nette chez leurs élèves ces années-là par rapport à leur écoute, leur concentration et leur investissement. Le corps se délie un peu, ils osent plus. Pendant les ateliers, il est très évident que le plaisir et l’envie sont présents. Je suis toujours étonnée de voir à quel point les élèves sont capables de vite comprendre les enjeux de connivence, combien leur imagination est présente et active, combien ce travail semble les soulager en leur laissant une liberté de création (sous condition de sens, évidement !) et de parole. Il est extrêmement rare que l’un d’eux ne joue pas le jeu d’être actif.

Ce travail trouve son aboutissement dans des moments d’audition en cours d’année mais aussi dans l’examen de fin d’année pendant lequel les élèves devront produire une courte improvisation à plusieurs. Bien entendu cette prestation, très particulière puisqu’elle laisse percevoir les espaces personnels de l’instrumentiste beaucoup plus nettement qu’une œuvre interprétée, ne sera ni évaluée ni notée par le jury. Elle permet par contre que celui-ci ait une idée plus complète de l’élève puisqu’il l’aura entendu à la fois dans son espace de liberté et dans son jeu d’interprétation.

Pour les élèves de fin de deuxième cycle, une place spéciale est faite dans le travail à la prestation publique : nous travaillons sur la présence et son l’importance face à un public, sur le lien avec l’autre et le soutien qu’il peut représenter, sur le lien avec un accompagnateur, nous faisons un travail sur le trac, sur l’attention au corps et à la pensée lorsque l’on est en situation de prestation, sur l’attitude la plus porteuse sur la scène face à un public. Nous avons le temps aussi de nous occuper de « notre son personnel », ce que cela veut dire, ce qui peut aider à le(s) trouver ….et bien sûr : oser, se lancer, savoir ce que l’on VEUT dire, prendre des décisions ….

Des témoignages de parents d’élève après une audition avec de l’improvisation pour des élèves de premier et deuxième cycle violoncelle : « C’était bien la 1e fois que j’observais une telle unité au sein d’un groupe de musique de chambre avec d’aussi jeunes participants qui étaient vraiment « ensemble ». Avec ces consignes et l’improvisation, les enfants sont OBLIGES de s’écouter, ce qu’ils ne font pas d’habitude! Cela demande une grande concentration et le résultat était là. Merci pour votre travail. » S.M

« Un grand merci à vous pour ouvrir la musique à la poésie et à l’émotion. L.P

  1. Enregistrement d’une improvisation au cours d’une audition en 2012. Pas de consigne particulière à part s’écouter et tirer des fils… Groupe de 4 élèves du 2e cycle violoncelle du Conservatoire + Emmanuelle 4:53

Concert au CRR. Improvisation* d’un groupe de 4 élèves du 2e cycle violoncelle du Conservatoire, plus moi, au cours d’une audition en 2013. Pas de consigne particulière à part s’écouter, jouer en même temps en tirant son fil mais également le fil de l’ensemble, et en cherchant à se positionner par rapport aux idées de chacun…

 

Avertissements par rapport au matériel vidéo et audio

Ces enregistrements, reflets, sans aucune exception, de créations spontanées et éphémères qui ont eu lieu pendant la dernière soirée de différents stages de ces dernières années, correspondent à des improvisations « libres » et ne sont donc pas des morceaux reposant sur un système de grilles ou de consignes posées à l’avance entre les protagonistes. Ce ne sont bien évidemment pas des « produits finis » mais seulement des témoignages de ce qui peut surgir de ces moments de partage. Nous ne savons pas, au moment où nous commencerons à jouer, ce qui va être produit et où vont nous conduire nos premières notes. Nous ne savons d’ailleurs pas quelles vont être ces premières notes…Rien n’a été décidé à l’avance. Nous allons nous centrer, écouter et dérouler notre fil en nous appuyant les uns sur les autres pour créer une œuvre éphémère, certes, mais (et ceci est notre but) sensée.
Etant donné cette (énorme !!) difficulté, chaque prestation contient un certain nombre d’imperfections, inhérentes au danger de ce travail « sans filet » et qui correspondent à des temps de recherche, « d’erreurs » de compréhension de l’autre etc.
D’autre part cette musique, crée dans l’instant, perd une partie de son sens dans les enregistrements : le lien avec le public ne se ressent évidemment pas, or, il est capital dans ce genre de pratique : le public est partie prenante, beaucoup plus actif que dans un concert normal, et ceux qui sont sur la scène en profitent et sont aidé par cette attention particulière.
Enfin, ces enregistrements témoignent de QUELQUES façons de jouer parmi tant d’autres : chaque musicien apporte sa propre couleur musicale et le résultat des échanges est bien sûr toujours différent.